Regards de Carnaval

Regards de Carnaval par Xaba

Le ridicule des autres bien souvent n’est que le reflet de notre propre inconsistance.

On se condamne parfois à des sommations impitoyables. On ouvre les yeux, on observe les autres, on se regarde.

On s’y oblige comme on répond aux injonctions du Carnaval, ce délire aux atours séduisants, aux grotesques mascarades.

Le carnaval qui chaque année devient miroir et lunette.

Il nous libère des commandements qu’on respecte par nécessité mais dont on s’affranchit ce jour-là par trivialité ou fanfaronnade. Peu importe que la farce soit grossière : on s’y abandonne avec d’autant plus de ferveur que l’on sait que bientôt reviendra l’obligatoire, cet abominable ordre auquel on adhère avec passion mais qui secrètement motive toutes nos rancœurs. Il faudra bien alors cesser de regarder avec si peu de compassion et revenir à plus de complicité aveugle.

Que le joug éphémère de ce roi Momo(1) paraît enviable ! Peut-être est- il le seul tyran qui à rien ne nous oblige. Pas même à contempler résolument notre reflet dans un miroir et à consigner dans les carnets ridicules de cette périlleuse aventure les incohérences qu’on nous enseigne à ne pas voir. Sous nos traits grimaçants, elles sont tellement évidentes.

On nous apprend à ne plus rire de nous-mêmes, à nous moquer seulement des autres. On nous apprend aussi à ne plus voir , à ne plus observer. Et l’on respecte allégrement la règle d’un jeu que l’on ne reconnaît pas être truqué.

Mais en riant des autres, on se moque toujours un peu de soi-même ! En regardant ses frères on reconnaît aussi son propre sang. Peut-être alors se sent-on moins coupable et moins seul.

Comme les miroirs parfois sont trompeurs quand on n’ose plus se regarder dans le fond des yeux !

xaba